Ils avaient inventé, réinventé, la correspondance érotique. Ou amoureuse. Il y a bien longtemps que leurs chemins s’étaient croisés.
Sans l’avoir décidé ni voulu, ils avaient multiplié ces rendez-vous.
ELLE ne le voyait pas. De lui seul, lui parvenait sa voix, le son de sa voix qu'IL avait grave et chaude. Sa voix la trouble... IL le sait...! IL en joue... Comme d’une caresse!
Grave... Chaude... Sensuelle... Tendre... Elle la bouleverse...!
IL en jouait encore et encore bien sûr, musardant sur les mots, flânant sur les syllabes, un brin provocateur. D'autant qu'il y avait les mots qu'IL choisissait, la façon dont IL les tenait en bouche, la manière dont IL les mettait en scène. IL savait le pouvoir sensuel qu'il y avait à dire ces mots-là.
Pas de ces mots froids engendrés par la machine à écrire, pas de ces mots virtuels crachés par un ordinateur, des mots vivants!
D’abord c’est un point qui se délie, forme une boucle ou un trait, un accent, une virgule, une lettre, une autre encore et l’émotion jaillit suivi d ‘une ribambelle d’autres.
L'ineffable plaisir des mots échangés, des confidences partagées, des émotions ressenties nous entraînent dans un tourbillon de désirs tout au long des semaines. Jour après jour, pour ne pas dire heure après heure, nous nous rapprochons, nous nous découvrons.
Nous en arrivons parfois à une intimité rare... sans s’être encore vraiment vus !
Un beau jour, ou fut-ce un beau soir, IL lui avait murmuré de s'installer tout à son aise, dans son fauteuil habituel ou sur son canapé ou sur son lit.
Et puis IL lui avait dit qu'IL voulait l’entendre se caresser sur ses mots.
Qu'à défaut de la voir, à défaut de la toucher, de la sentir, la goûter, IL voulait l'entendre gémir encore et encore de plaisir.
IL n’exigea pas qu’ELLE se mette nue ; IL voulait que ce soit l’émotion grandissante, le trouble pénétrant qui la conduise à se dénuder.
Deux personnages qui se rencontrent par l’entremise de leurs mots
Dans le reflet de leurs pensées
L’imaginaire de leur charnelle connivence.
Un homme d’airain, une femme ambrée,
Que la distance et le temps s’acharnent à séparer,
S’inventent un monde de liberté,
Où la saveur de leurs baisers s’épice d’une succulence érotique
Un monde sensualisé par la portée de leurs caresses
Un monde de désirs inaltérable mu par le feu de leur désir.
ELLE fut émue de cette demande, souriant à son alter ego, regrettant qu’IL ne puisse la voir.
(ELLE songea tout à trac qu’il leur faudrait utiliser la visiophonie, une prochaine fois !).
Joueuse, ELLE ne répond pas d’emblée, laissant cascader un rire taquin.
ELLE donna son accord à ce jeu nouveau, mais précisa une condition incontournable : qu’IL en fasse autant, à sa demande, quand ELLE le souhaiterait.
Le sachant galant et plein d’égards, ELLE essaya de prendre l’avantage en lui demandant de lui accorder le privilège d’être la première à le guider dans ses attentes…
Ils n’en étaient pas à leur premier échange téléphonique. Le troisième peut-être ?
Peu lui importait, ELLE voulait maintenant qu'IL bande de l'entendre chuchoter, murmurer, susurrer à son oreille ce qu'ELLE avait envie qu'IL fasse. Ou ne fasse pas…
ELLE voulait qu’IL lui dise, que son sexe était tendu à l’extrême, mais ELLE lui refusait le droit de l’extraire de son slip.
ELLE devinait la dérive des phrases qu'ELLE prononçait et l’émoi dans lequel ELLE le plongeait.
ELLE avait envie de lui dire : « Je t’accompagne… Je suis là. Suis mon rythme. Entends ma voix, mes soupirs. »
ELLE entendait à l'altérité de sa voix le pouvoir qu'ELLE avait sur lui, sa respiration plus rapide, ses mots hésitants, la tonalité de sa voix qui s'était modifiée.
ELLE l'enveloppait de ses propos charnels pour qu'ils se lovent au creux de son oreille.
Les yeux fermés, ELLE l’imaginait, assis sur son canapé, presque allongé ; ELLE entendait sa respiration et perçut un changement, devinant qu’IL essayait de reprendre ses esprits.
Sa voix, alors, résonna dans son appareil, cette voix magique qui l’enveloppait de frissons.
ELLE l’entendit murmurer qu’IL voulait écrire les mots du désir sur son corps !
IL la provoqua en lui assurant qu’IL savait qu’ELLE l’écoutait lui parler muettement, et qu’ELLE aurait voulu lui dire o combien ELLE avait envie d’avoir besoin de lui.
IL entendait sa voix à l'autre bout de ces ondes qui animaient et animeraient tous leurs moments...
IL la regardait suivre les courbes de son corps au rythme de ses paroles, avec ses mains.
Toute une extase de se sentir bien. IL avait envie qu’ELLE éprouve une envie intense.
Ardente. Envie de l’entendre lui dire : «Viens, je t'en prie, possède moi encore, viens t'abriter en moi, là, oui, et là, et là aussi … »
Envie de l’entendre crier... En douceur pourtant.
IL aimerait découvrir que certaines zones de son être de chair et mental soient encore vierges...
« Je suis pur avec vous. Vous êtes pure avec moi. Soyons joliment impurs !!! »
ELLE sentait s’insinuer en ELLE une émotion nouvelle, inédite. ELLE tenta de se secouer, s’éclaircit la voix pour reprendre le contrôle…
Telle une lancinante mélopée, elle lui suggérait les fantasmes qui ne manqueraient pas de lui plaire afin qu'IL connaisse une ascension dont elle voulait qu'elle se prolongeât encore, avant d'exploser dans une fulgurance orgasmique.
Mais à son tour, ELLE fut, ELLE aussi, entrainée dans la chaleur des propos tenus, l'incendie se propageant, sa voix se fit plus lente, plus espacée, entrecoupée, haletante.
Dans un souffle, ELLE demanda s’il bandait, lui avouant qu’ELLE mouillait, excitée de sentir sa culotte trempée.
IL ressentit un plaisir inédit, subtil à lui répondre que l’échange engendrait une émotion assez évidente et qu’il ne pouvait dissimuler les réactions de son corps.
IL songeait en même temps qu’il a suffi de quelques mots d'accroche pour qu'en retour, un fil tisse sur les ondes une possibilité particulière. Ce ne fut pourtant au départ que quelques mots nés de la curiosité. Et pourtant, un lien se crée, impalpable dont on ne sait où il va nous mener. Au fil du temps, il reste présent, persiste malgré tout, malgré rien, hormis des mots. Quelques mots passant qui font sourire, qui émeuvent, qui évadent, qui charment et qui deviennent attente d'autres à venir.
IL l’exhorte alors de continuer à lui parler :
« Parlez-moi encore, vous qui désirez que je continue de vous parler, de vous dire ce qui m’habite, ce que vous insinuez en moi,
votre chatte le demande, vos mains continuent l'avancée afin qu'explose sur vous votre propre désir... Moi pourtant relié à vous par le fil de ces ondes...
J'aime quand, de mes paroles, vous envahit cette brûlure qui, petit à petit, vous domine. Et je me tais.
Et vous ne dites rien mais je vous entends implorer que je vous prenne, dans tous les sens, pour être ma Muse, ma maitresse, mon amante, ma femelle devant les éléments de la vie. »
ELLE ne peut que répondre dans un souffle :
« Continue, chaque jour, à me faire frissonner...
Sous le souffle de tes mots... Doux et... chauds...!
Fais rougir mes joues des aveux que tu me dérobes...
Et d’émotion, mes seins se durcir sous ma robe...! »
Et pourtant ce ne sont rien que des mots. Mais ces mots, ce sont les siens conjugués aux vôtres. Et c'est l'attente des mots de l'autre. Et vous restez fébrile, en suspension, en inquiétude qu'il ou elle puisse préférer les adresser à d'autres. Et soudain, les mots affolent vos oreilles, et vous voilà à rire seuls, ensemble, le combiné collé à votre orifice…auditif !
Peu à peu les mots s'installent et vous font découvrir un peu plus l'autre, les mots se font reflets de ce qui est encore à peine naissant. Les mots s'attardent et se prolongent ayant peine à devoir un temps s'interrompre. Les mots s'échauffent et laissent échapper des attirances qui entraînent bien au-delà du raisonnable. La palette des émotions s'intensifie et la valse des sensations vous emporte à sa suite.
Enveloppée d’un tourbillon d’émotions, de sensations, ELLE lui souffle alors plutôt qu’ELLE lui dit qu’ELLE imagine le regarder, maintenant, à cet instant où ELLE veut qu’IL ouvre sa braguette, qu’IL se libère de son pantalon et qu’IL laisse enfin son sexe à l’air libre.
ELLE lui promet qu’aussitôt après, ELLE trousserait sa robe et enverrait sa culotte aux oubliettes des désirs.
Les joueurs de poker disent " mon temps, et tous mes droits..." ...
IL voulait prendre le temps de tout se permettre sur ELLE, devinant qu’ELLE éprouvait le même désir du même jeu !
Sagan a dit " mon passe-temps favori c'est de laisser passer le temps"...
Quelle idiotie !
On n'a jamais assez de temps pour prendre le temps du désir, du plaisir.
Ou même simplement...du bon temps !
« De l'audace, en toute occasion de l'audace et encore de l'audace. » a écrit Spencer.
N’y tenant plus, ils ont alors l’audace de se caresser ensemble…
C'est presque de concert que, des deux côtés de la liaison téléphonique, les mots se turent, submergés par la vague de plaisir qui les saisit.
Un long silence envahit leurs téléphones.
A bien tendre l’oreille, on entend le chuintement des respirations, le souffle du plaisir encore intense.
ELLE ne sait pas s’IL s’offrit du plaisir.
IL ignore si ELLE a envoyé sa culotte aux oubliettes…
IL ne veut pas troubler son silence de plaisir.
Etonnamment, ELLE a la même sensation, ne rien dire, ne rien demander.
Seulement imaginer, chacun de leur côté mais pourtant tellement proches.
Il ressent pourtant une puissante envie de lui dire, « rapproche-toi »
Juste au creux de son oreille.
Envie de lui dire, ces mots,
Ces mots qui font sourire
Ces mots qui la font tressaillir.
Envie de lui dire, « viens plus près »
Juste pour elle, message personnel
Envie de lui dire des mots
Des mots qu'on conjugue à deux
Envie de lui dire, tout son émoi
Des mots qui montent aux yeux
Envie de lui dire, très envie...
Envie de les entendre...
IL voudrait que ses orifices ne cessent de chanter les plus fous cantiques comme s’il la caressait.
IL voudrait l’amener en catimini à la plus irraisonnée impudeur…irraisonnée mais très raisonnable !
Passion … des mots !
Le désir donne naissance aux mots.
Tout comme les mots peuvent engendrer le désir.
Dans un souffle troublant, ELLE chuchote qu’ELLE n’a pas pu résister et qu’ELLE est à présent débarrassée de sa petite culotte.
Oser les gestes.
Oser les mots.
Les regards et les mots.
Jouer avec nos désirs…
Mettre en musique nos mots,
En gestes, nos envies,
En chant infini,
Toutes nos folies.
ELLE attend, ELLE espère qu’IL en a fait autant de son slip mais ELLE ne veut pas le demander. ELLE aimerait tant qu’IL lui en fasse la confidence spontanément.
Ses désirs la font rêver.
Ses envies emportent ses désirs si loin.
IL la sent sorcière, ELLE se fait fée,
IL la tient serrée dans sa main.
Dans le faisceau de ses caprices.
ELLE voudrait l’enfermer dans ses doigts
Que ce soit pour lui un délice.
Avant d’être un doux supplice.
La distance les séparant disparaît tant ils sont proches.
IL lui dit son plaisir de la savoir sans culotte
Et lui demande de ne surtout pas se caresser.
« Pose seulement ta main sur ton sexe, à plat,
Laisse tes envies imprégner ta paume de tes senteurs.
As-tu deviné que j’ai baissé mon slip, pour toi ? »
ELLE frémit de cette confidence, ferme les yeux, ELLE imagine sa verge tendue.
ELLE appuie un peu plus sa main sur sa chatte.
« Je souris quand je pense à nous.
Tout mon être est en émoi….
Te mots me comblent d’impatience
Tu me combles de rêves.
Laisse-moi te combler
Prends ton sexe dans ta main. »
IL sourit, IL lui sourit et lui obéit.
Le téléphone à l’oreille, les yeux sur sa queue,
IL lui sourit encore.
« Donne-moi ta main ».
SUITE A VENIR … ?